mardi 1 juillet 2008

le parc de Bagatelle


On entre à bagatelle par une grille en fer forgé bleu et or, grille du jardin de Cendrillon, qui ne semble encore qu’une extension du Bois de Boulogne. Une auberge de luxe se découvre au bout de cette allée cernée de grands arbres qui cachent le jardin à proprement parler. On passe, une autre auberge plus pittoresque, brique rouge et pierre blanche. On passe, on passe vers le Kimonos. Ils sont beaux, mais peu nombreux, les couloirs sombres en rendant les couleurs d’autant plus éclatantes. Au fond, on est vite dehors… et sur sa faim. Et là, au loin un petit coin vers. Au surprise, un jardin de pivoines, belles, orgueilleuses, magnifiques et hautain comme les dahlias entêtants. Une sphinge les garde, marmorréennement. En face, blanche aussi, une paonne. Du jardin de cendrillon encore. Et à tourner autour d’elle pour la photographier, elle nous pousse lentement vers un étang de nénuphars et d’herbes folles. Au bout, une grotte, dans la grotte, une chute d’eau, et dehors aussi, et des canetons, et d’autres fleurs. Tournons autour de la grotte pour voir si on peut l’escalader, mais aussi, au loin, il y a encore une autre allée. Que nous suivons. Vers le repas des chats. Bagatelle regorge de chats et une âme bienveillante vient ce soir là sous nos yeux médusés en faire sortir une dizaine des fourrés autour de nous, méfiants, magnifiques et fiers. Une autre allée plus loin, une roseraie. Immense, des roses, des rosiers en damiers, des buissons de toutes les couleurs, les couleurs de répétant, et de belles roses dardant leur têtes lourdes sur l’horizon vert, face à d’autre roses, et encore des roses. Un océan multicolore de rose. Nous le quittons embaumés, entêtés, et l’allée sinueuse nous mène à une petite roche offrant un point de vue sur le parc, comme une grande cage à oiseau. A ses pieds, un autre petit étang, mais timide celui-là, aux belles plantes presque sauvages, presque, on ne s’y trompe pas, mais qu’en ont-elles l’air ébouriffé ! Et derrière cet étang, encore un étang, que de crapauds princes doit-il y avoir ici la nuit tombée. Cet étang-là est celui de la grande-roche, plusieurs mètres de haut, elle domine, et lâche une chute d’eau magistrale sur les calmes nénuphars ondulants à ses pieds. Nous y tournons, et retournons, et à force de tourner nous en éloignons, pour croiser deux paons, les vrais maîtres, incontestablement, de ce jardin. Ils nous poussent vers l’auberge, vue auparavant. Mais là, quelle surprise, la petite auberge rouge dissimulait un magnifique jardin de plantes grimpantes, un mur de roses multicolores ! Des arceaux de clématite violette, et des plantes folles, des plantes folles partout entre les allées, de toutes les couleurs, de toutes les tailles, rayonnant en tout sens. L’auberge dépassée, nous retrouvons l’autre, la luxueuse, sans nous en rendre compte, car, devant nous, médusés, la plus grande roseraie qu’on puisse imaginer. Cette fois les allées sont de graviers, et les rosiers, poliment plantés entre elles, et parfois, entre les buissons rampants, un rosier au tronc fin, développé en boule à sa tête se tend vers nous pour mieux faire sentir des fleurs de velours. Il y a de quoi se perdre dans cette roseraie, à vouloir toutes les voir, et d’avoir le vertige tant la tête tourne en tous sens à vouloir les embrasser en un regard, la munificence de ce jardin secret s’offre en un tel bloc sublime qu’elle laisse pantois, hébété, et triste sous l’effet du choc, de l’impossibilité, de la frustration et du manque. Un petit jardin aux calmes iris nous rassérène un peu, et l’allée monotone de sortie achève de nous préparer à quitter Bagatelle, à le laisser à ses paons, tandis que nous, pauvres mortels, vivons la descente dans le métro comme une chute dans l’artificiel et le mécanique, bien plus tangibles, embrassable, et concret, que la délicate beauté de ce jardin impalpable dont le souvenir aiguillon nous pique depuis ce jour.

plus de photo ici :http://picasaweb.google.com/latourdivoire/ParcDeBagatelle



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