mercredi 12 septembre 2007

North


North, de Brian Martin, est un livre trompeur. la quatrième de couverture dit qu'il se passe à oxford, l'histoire d'un jeune homme au charisme rare qui séduit sa jeune prof d'histoire, puis le chef du département de physique, pour s'achever dans la débauche. Programme réjouissant se dit-on. Et le lisant, on se rend compte qu'il en est tout autrement, bien mieux encore, que ce qu'on imaginait... North, pour commencer, n'est pas un titre étrange, destiné à me faire frissonner alors qu'on est en été, il n'y a pas de lien à chercher avec le nord, c'est tout simplement le prénom de ce jeune homme étrange. North, n'est pas un étudiant à Oxford, l'université, mais un lycéen en dernier année dans un des lycées de la ville d'Oxford. Quant à la débauche, elle est toute relative, pas de partie à trois ou rien du tout du genre comme la couverture, qui se veut vendeuse, essaie de le laisser croire. c'est plutôt la transgression des barrières morales habituelles.

Le livre en lui-même est fascinant, il tient en haleine du début à la fin. le narrateur est un prof de littérature d'une cinquantaine d'années qui regarde l'histoire sous ses yeux en n'y participant que marginalement, de très loin. Il faudrait parler de North là, mais c'est difficile, Martin a réussi à la rendre si éthéré, surréel en un sens. c'est un jeune homme au charisme fou, sûr de lui, particulièrement mûr, il a percé le fonctionnement des relations humaines, des lois de la séduction, c'est le Méphisto de Faust. il semble pouvoir lire dans l'esprit des gens pour les amener exactement là où il veut les faire aller. le narrateur, lui aussi, naturellement est sous son charme, il dit que North est quelqu'un dont, lorsqu'on le voit, o recherche immédiatement la compagnie, dont on a envie d'être proche, que lorsqu'il nous parle, on se sent privilégié, seul avec lui, objet de toute son attention. à côté, il dit aussi que les protestations d'amitié et d'affection de North, si elles lui semblent pourtant sincères, ne le convainquent jamais entièrement, il y a toujours une partie de lui qui se demande si ce n'est pas une autre façon de le manipuler, de le faire participer à un plus grand plan dont il ne verrait pas encore les tenants et les aboutissants. Peu à peu dans le livre, au détour de petites phrases s'instille le doute, North parfois semble plus qu'humain, le narrateur parle d'une froideur effrayante, abyssale de certains de ses regards, peu à peu, devant la façon dont il semble manipuler les gens, il y voit dans ses cauchemars la marque d'une créature peut-être plus qu'humaine, d'une intention maligne. Il ne sait pas, et au réveil, tout lui semble stupide. Mais il y a toujours le bien-être qu'on éprouve aux côtés de North, que tous les personnages éprouvent, qui semble être ce qui les pousse en avant, comme si North les révélait à eux-mêmes, leurs désirs cachés, et en face, il y a le chaos qui peu à peu s'installe, en suivant leurs désirs, en ne reculant plus, les personnages brisent des liens, font, presqu'iconsciemment, des choix sans retour. Le narrateur voit venir les désastres et demande à North d'intervenir, la fascination qu'il inspire est si grande qu'il a l'impression que tout est dans la main de North, et on y croit, et en même temps on en doute. Il y a ce qui est logique, les personnages sont responsables de leurs choix, et ce qui paraît, North contrôle tout, North peut empêcher ou provoquer les crises. Le récit nous plonge ainsi entre deux eaux, nous fait miroiter une élucidations finales, à coût de petites phrases proleptiques "je ne le savais pas alors", ou "je pensais encore à ce moment", ou, mieux, "si j'avais su...". et lorsque le livre se clôt, brusquement, on n'est pas plus avancé, on n'en sait rien. Peu à peu, on en vient à se dire que le livre se clôt après le drame, puis qu'il y a les réflexions que le narrateur se fait sur tout cela, qui, longuement mûrissent, et mènent à ce livre. à la fin du livre, possédant les mêmes clefs, la même vision des événements que le narrateur, on coïncide en un sens avec celui-ci, et si on relisait alors North, on pourrait faire notre toutes ses paroles, se fondre dans une identification totale.

c'est un livre complexe sous plus d'un abord, un livre indécidable, précisément ce qui fait son charme. ça et North... son pouvoir de fascination n'est pas restreint aux personnages de ce livre, il le dépasse, le transcende, on veut aussi le rencontrer, aussi se sentir choisi par lui, mais étrangement, malgré ses qualités de séductions évidentes, on n'a jamais, jamais envie d'être comme lui, d'être lui. très fort je trouve...

Aucun commentaire: