samedi 10 mars 2007

Desert Flower

C'est le titre d'un livre. De Waris Dirie. Elle fut mannequin, elle a débuté aux côtés de Naomi Campbell, pour le calendrier Pirelli, elle est Somalienne. Elle est ambassadrice de l'ONU aujourd'hui, pour défendre une cause qui lui est chère et toute personnelle : le combat contre l'excision.
ce qui suit est un article que j'avais écrit il y a quelques mois pour le blog d'une amie - elsia - qui m'avait gentiment proposé de le publier.

Il est des choses dont on n’a pas envie de parler, des choses dont on ne veut pas savoir qu’elles existent… Et pourtant, parfois, il est des voix qui s’élèvent, dérangeantes, pour nous les rappeler. Celle de Waris Dirie est de celles-ci. Cela devrait surprendre ceux qui la connaissent comme mannequin, mais pas les rares qui la savent ambassadrice à l’ONU, ou qui, comme moi, ont découvert son autobiographie, Desert Flower. Elle est née dans une tribu de nomades somalis, a été excisée toute jeune, et, malgré la honte, la douleur, elle en a fait sa cause. Parce que cette pratique, « traditionnelle », concerne encore vingt-huit pays africains à ce jour. Vingt-huit pays où « au moins deux millions de filles courent le risque, chaque année, d’en être les prochaines victimes, cela fait 6000 par jour » écrit Waris Dirie, et sur celles-ci, 80% subissent l’infibulation, tout comme elle. Ce sont des chiffres qui devraient – je dis devraient, parce que je sais bien que ce n’est pas le cas, nous sommes nés ici, nous ne pouvons pas nous rendre compte – nous faire frissonner d’effroi. Si nous savions.


Le peu qu’on sait communément, le plus souvent, c’est qu’elles n’ont pas d’orgasme, et on se dit bah, c’est triste, mais bon… voilà quoi…On pense, à tort, que des chirurgiens peuvent les opérer, tout réparer, leur rendre leur féminité. On ne dit pas qu’une femme excisée met dix minutes à uriner, parce que – et oui – on a totalement redessiné toute son anatomie. Elle urine au goutte-à-goutte. Et il en va de même pour les règles, une dizaine, voire une douzaine de jours, tous les mois, dans des maux de ventre qui ne sont rien comparés aux nôtres. Lorsqu’elles se marient, leur époux les pénètrent de force, ou ouvrent leur passage au couteau… Lorsqu’elles accouchent, elles se déchirent la plupart du temps, en meurent très souvent, trop. Mais toutes ces « choses » ne concernent que deux femmes sur dix à naître dans ces pays, nous dit Waris – les huit autres meurent des suites de l’excision. Et c’est normal quand on y réfléchit : gangrène, infection, tétanos, septicémie, hépatite B ; car on leur retire les petites lèvres, les grandes, la totalité du clitoris, dans le pire des cas, le plus fréquent, et on recoud avec une vieille aiguille, parfois une épine. « On », ce n’est pas un médecin, c’est une « sage-femme », si on peut dire, ou une femme du village, exerçant traditionnellement cette fonction. Elles passent ensuite une dizaine de jours les jambes attachées ensemble, pour que la plaie cicatrise, isolées du clan, sous un arbre, couchées, à attendre de voir si elles vont vivre ou mourir. Elles n’ont pas cinq ans parfois.

Beaucoup pensent, nous dit Waris, que cette pratique est inscrite dans le Coran. C’est absolument FAUX. Cette pratique est promue et exigée par des hommes, « ignorants et égoïstes », voulant s’assurer la propriété des faveurs sexuelles de leurs femmes. Une femme non circoncise est considérée comme sale, à la sexualité débridée, on ne peut la marier, ce qui hypothèque alors sa survie. Waris dit à un moment, que si on pratiquait cette mutilation sur des hommes, on n’en parlerait déjà plus aujourd’hui, elle aurait cessé d’exister. Je suis née en Occident, j’ai du mal à voir les hommes comme cela, à penser qu’ils peuvent laisser faire cela, ou, pire, le vouloir. Parce que ceux je connais ne supportent pas de m’entendre parler d’excision, de m’entendre l’expliquer. Moi non plus à vrai dire. Mais je suis une femme, ce n’est pas comme si j’avais le droit de me taire, sachant cela…

Allez voir le site de l’ONU, renseignez-vous, parlez-en autour de vous, signez les pétitions… ! Je sais, on veut l’oublier, parce que c’est horrible, mais on pourra le faire quand cela aura disparu, et le mauvais moment qu’on passe à en parler, n’est rien, rien du tout comparé à leurs vies…

13/11/2006.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

dans les pays dit industrialisés, il est souvent plus facile de faire la politique de l'autruche, ne pas voir, ne pas savoir ce qui se passe, pas loin de chez nous. Ignorer la souffrance, le malheur de toute une catégorie de la population, c'est être égoïste et se complaire dans son petit monde bien propre, bien net. Ce n'est que lorsqu'on admettra que ce genre de choses existent encore dans notre 21° siècle, que peut-être on arrivera à les faire évoluer.